Nicolas39 - Pêche à la mouche

La pêche à la mouche sur le blog de Nicolas Germain, un Jurassien amoureux de sa rivière, la Haute Rivière d'Ain.
Centre de pêche en Bosnie.

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Gestion piscicole

Les actions menées sur le terrain et infos diverses sur le monde complexe de la gestion halieutique

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mardi 13 mai 2025

Rigaux a tout gâché.

Nous vivons une époque ou un type, un seul mec, peut, avec l'écho que lui font les médias, mettre à mal un travail de longue haleine. C'est ce que vient de faire le triste sire Pierre Rigaux. Parce qu'il ne faut pas se leurrer, avec le tsunami médiatique sur son discours et les réactions qui s'en sont suivies, c'est mort. Aujourd'hui, et pour longtemps, il y aura deux camps bien distincts. Les pour ou contre le Comté. Rigaux aura réussi à rassembler tous les défenseurs des rivières modérés dans le même sac avec lui aux yeux de la majorité. Ce n'est pas moi qui le dis. Il suffit de voir les milliers de réactions toutes populations confondues sur les réseaux sociaux.

Touche pas à mon Comté. Voilà l'image qui circule de partout.

Tout le travail abattu ces dernières années de façon plus modérée est effacé. Nos politiques locaux, Mme Brulebois en tête sans parler du Préfet qui a omis sa neutralité (inadmissible), montrent un chauvinisme sans nom dans leurs déclarations. Ou bien c'est qu'ils sont tout simplement dans le déni le plus total sur la situation actuelle des rivières franc-comtoises. Quoi qu'il en soit, ils sont les premiers à être tombés dans le panneau de Rigaux en répondant eux aussi de façon binaire. Je les pensais plus intelligents que ce type à la réputation déjà bien faite dans le monde de la chasse. Du coup, le résultat est là. Rigaux n'a convaincu personne sur le mal dû à l'excès de production du lait à Comté si ce n'est ceux qui l'étaient déjà. Par contre, il a réussi à créer une montée de boucliers populiste avec tous les "sans avis" qui en ont un aujourd'hui. Et il est résumé par le hashtag #Touche pas à mon Comté

Bien entendu, le monde paysans est vent debout et c'est bien normal. Eux, c'est leur vie, c'est leur unique gagne pain avec une profession pas simple du tout. Comment est-ce possible de vouloir interdire ce formage ?? Ce type est un extrémiste, point barre. Tout le monde est tombé dans le panneaux. Les paysans, les sans avis, les politiques, tous. Comme c'est triste !

Oui, nos rivières souffrent. Elles souffrent en partie à cause des excès de lisiers sur nos sols, c'est ainsi. C'est un fait. Elles souffrent tout autant des systèmes d'épurations défaillants. Et dans le Jura, ils sont nombreux. Elles souffrent de bien d'autres maux comme le réchauffement des eaux ou bien encore des oiseaux piscivores allochtones. Tout mettre sur le dos d'un seul coupable n'est pas fondé. C'est même ridicule. Pourtant, c'est ce que le discours de Pierre Rigaux fait penser à la majorité.

Ce qu'il vient de se passer était prévisible tant la communication de nos fédérations de pêche sur le sujet est timide voir absente. Quand on laisse la place vacante, d'autres la prennent. Pour moi, c'est une grossière erreur. On l'a vu venir pourtant. C'est Hugo Clément qui a allumé la première mèche en prenant à son compte le sujet. Aucune réaction de nos instances. Rien, on a laissé faire. C'est pourtant nous les pêcheurs qui sommes les plus crédibles sur ce sujet. C'est nous les sentinelles de ces rivières en perdition. Nous avons tout un collège de techniciens hautement qualifiés dans les bureaux des différentes fédérations mais rien. Alors il y a certainement un travail de fond, mais en terme de communication, c'est le désert. Force est de constater que c'est un terrain qui a une importance démesurée de nos jours. La chasse a compris cela depuis bien longtemps avec une grosse com et un président omniprésent sur tous les fronts. La pêche est à la traîne sur ce sujet pour ne pas dire plus, c'est flagrant.

Rigaux en a profité. Après Hugo Clément, c'est le niveau au-dessus de la vision extrémiste. Le résultat est ce qu'il est aujourd'hui. Un désastre irrattrapable. Être considéré au même niveau que ce type par le camp "Pour le Comté", ça me fait mal au derrière quand même voyez-vous. Ce type est détestable. Il pourri le monde de la chasse depuis des années avec des méthodes à vomir. D'ailleurs, les verts (le parti politique) qui ont communiqué pour vite se détacher des propos de Rigaux sur le Comté ne l'ont jamais fait sur la chasse, c'est marrant.

Rigaux a donc tout gâché. Mais vraiment tout. Sauf pour lui, puisque détruire les gens, leur activité, leur passion, c'est son gagne pain. C'est un personnage qui gagne plus de 3000 euros par mois avec des dons. C'est merveilleux non ? Faut pas avoir de honte pour demander l'arrêt du Comté à des mecs qui se lèvent à 5h du matin tous les jours en gagnant sa vie comme il le fait ! Par contre, le type est soit super couillu ou alors complètement inconscient puisque j'ai appris il y a peu qu'il vivait de façon permanente dans le Jura....Soit au milieu des paysans et des chasseurs !

mercredi 7 mai 2025

Dans l'indifférence générale.

J'ai souvent parlé du sujet ici mais ma facture d'assainissement arrivée ces jours m'a donné l'envie de remettre le couvert tant la situation reste inadmissible. Oui, une facture qui s'élève à plusieurs centaines d'euros pour un service qui s'avère depuis de nombreuses années complètement déficient. C'est un sujet connu de tous, que cela soit les services concernés, les élus communaux, les élus de la fédération de pêche, les politiques locaux de tous bords. Notre AAPPMA l'a dénoncé de très nombreuses fois, il y a eu une action en justice et puis plus rien...La situation reste inchangée. Les citoyens paient plein pot alors que l'assainissement ne se fait pas pas correctement, que nos rejets domestiques rejoignent la rivière d'Ain en étant traités que très partiellement.

Le ruisseau de rejet après la lagune à une vingtaine de mètres de la rivière.

Mais qu'on se rassure, à part deux ou trois pêcheurs, cela ne gène personne. Surtout pas les élus, encore moins les baigneurs. Tout ce petit monde ne va pas tarder à patauger aux premières chaleurs quelques centaines de mètres en aval. Bon bain !

Quand on pense que même les truites n'y survivent pas, il faut avoir envie. Ou, et c'est le plus évident, ne pas être conscient de la situation. Oui, nos truites subissent aussi les excès de notre agriculture, bien sûr. Mais oublier notre assainissement parfois désastreux serait une grave erreur !

Poisson mourant photographié par mes soins ce week-end.

samedi 19 avril 2025

Ne pas se tromper de priorité.

Le coup d'eau est enfin arrivé sur la rivière d'Ain jurassienne. Les affluents ont vu également leurs débits augmenter de façon significative. À priori, c'est une très bonne nouvelle. On fera le constat dans quelques semaines. Oui, car ce n'était pas une crue au sens propre du terme, tout juste un coup d'eau. Pourtant, il est tombé plus de 70mm en 3 jours (mardi au jeudi) mais le déficit était tel que la rivière n'a pas gonflé outre mesure. Du coup, il faudra voir si ce coup d'eau n'a pas aussi emmener sa dose de polluants stockés sur ces 3-4 dernières semaines sèches ici et là. Sur mon constat du jour, les zones colmatées ont été en grande partie nettoyées. Bonne nouvelle. La température de l'eau qui était montée à 12 degrés le week-end dernier est redescendue à 9 degrés aujourd'hui. Bonne nouvelle.

Il était temps car le week-end dernier, les mauvaises nouvelles commençaient à pointer le bout de leur nez. J'ai eu quelques retours négatifs de poissons trouvés morts par les pêcheurs de Champagnole à Pont-du Navoy. Un ami a vu également 2 truites et un chevesne Mycosés sur Montigny. J'espère que la situation n'évoluera pas plus que ça.

En tous les cas, voilà un très bon rappel. La priorité à combattre pour l'avenir de la pêche, ce n'est pas la menace animaliste comme on a pu le lire en Une du journal local suite à l'AG de notre fédération départementale, mais belle et bien la qualité de l'eau. Comme depuis toujours en fait. Questionnez donc les pêcheurs qui prenaient des dizaines de truites sauvages sur des rivières jurassiennes comme la Sorne, le Suran, la Seille, la Valouse, la Serpentine et même la Cuisance...Ce ne sont pas les animalistes qui ont vidé les berges des pêcheurs jurassiens. Non, c'est uniquement la disparition progressive des truites sauvages suite à la dégradation de la qualité de l'eau. Le même phénomène est en cours sur les rivières plus connues du département comme l'Ain ou la Bienne. La conclusion sera identique !

En attendant, aujourd'hui, je n'ai pas vu de truite et encore moins de gobage, mais bien 3 harles bièvres et 1 cormoran...Encore un autre combat à mettre loin devant les animalistes.

Ombres et truites photographiés sur la haute rivière d'Ain la semaine dernière.

mercredi 12 mars 2025

Communication qui pause question.

La Fédération de Pêche du Jura a fait son choix en termes de communication pour cette ouverture de la pêche. Les images publiées sur les réseaux sociaux de laissent pas de place au doute. Cette panoplie de photos de poissons prélevés (dont des truites sauvages de la rivière d’Ain) a fait réagir et pas qu’un peu. Si l’on peut lire à travers les commentaires la déception et la colère de certains pêcheurs, j’ai également eu de nombreux retours dans un cercle plus privé avec des locaux extrêmement déçus pour ne pas dire plus.

Par cette prise de position, les choses deviennent très claires dorénavant sur les intentions de chacun. Les AAPPMA concernées et la Fédération du Jura semblent assumer pleinement le fait de prélever les derniers poissons sauvages de cette rivière d’Ain. Les critiques pleuvent sur nos dirigeants mondiaux qui vont au bout des ressources toujours plus vite sans tenir compte du changement climatique et des alertes de toutes parts mais finalement, nos dirigeants locaux pour la pêche ne font pas mieux. Ils iront jusqu’aux derniers poissons sauvages malgré des populations en chute libre et des atteintes extérieures toujours plus nocives sur cette rivière. C’est d’une tristesse.

Publication entière à voir sur Facebook.

De mon côté, je ne cherche plus à convaincre les gens. Chacun gère son territoire comme il l’entends après tout. Cependant, il faut assumer jusqu’au bout sans se cacher derrière des arguments plus bancals les uns que les autres. J’entends parfois des voisins en amont et en aval qui prennent notre linéaire en exemple comme quoi le fait de laisser la vie aux truites ne fonctionnait pas, que cela ne servait à rien, que c’était même partie prenante des causes de la baisse des populations…

Nous avons mis notre parcours sur sa totalité en No Kill pour freiner la baisse des populations, rien de plus. Nous possédons un linéaire sur la rivière d’Ain complètement dysfonctionnel. L’espoir pour améliorer la qualité de l’eau s’est envolé depuis longtemps malgré des preuves flagrantes d’excès en tout genre sur les points d’assainissements de Champagnole, Crotenay ou encore Montigny. Tous les témoignages, alertes ou autres plaintes n’ont jamais rien amélioré. L’eau chauffe toujours plus l’été. Les piscivores, harles et cormorans finissent le boulot. Bref, pour continuer à pêcher ces poissons sauvages, pas d’autres choix que de leur laisser la vie. On n’appuie pas sur la tête d’un homme en train de se noyer, on tente au minimum de le maintenir à flot.

Du coup, pourquoi se battre pour réhabiliter les tirs des cormorans s’il y a assez de truites sauvages pour continuer à les prélever. Les pêcheurs oui mais les oiseaux non ? Encore un argument bien bancal. Je souhaite de mon côté également pouvoir réguler les piscivores bien entendu mais pas pour bouffer les truites et les ombres à leur place ! Non, uniquement pour que les populations soient un peu plus solides parce qu’elles sont catastrophiquement basses.

Le pire dans tout ça c’est qu’on tous d’accord là-dessus. Les truites deviennent de plus en plus rares. Depuis 2015 tout s’est accéléré avec des étés caniculaires à répétition, c’est hallucinant les différences. Pas contre, à la fin, ben il y a les types qui vont aller manger dans les réserves sans se soucier du lendemain en se disant ben quand il y en a plus, il y en a plus. Et puis les autres, visiblement en minorité, qui tentent de se rationner au maximum en espérant que ça dure un peu plus longtemps sans non plus croire au père Noël.

Bref, tout ça pour dire que de remettre une truite à l'eau cela permet aussi à plusieurs pêcheurs d'avoir des émotions de joie et bien entendu, de laisser une chance à ces poissons de frayer un hiver de plus et même plusieurs ce qui n'est pas un luxe à la vue des géniteurs restant. La preuve encore, comme s'il en fallait une supplémentaire, avec ce poisson capturé par mon fils en juillet 2024 et mesuré à 60 centimètres. Poisson que j'ai eu l'immense privilège de croiser en ce week-end d'ouverture. Je l'ai pris avec la même nymphe d'ailleurs. Un peu plus long mais aussi plus maigre. Normal pour la saison. Mon fils a déjà revu cette truite deux jours après qui se nourrissait. Que sa vie soit encore longue !

Vous pouvez comparer les points, c'est bien le même poisson.

dimanche 9 mars 2025

Pollution des rivières Franc-Comtoises, facteurs induisant le développement de Saprolégniose et mortalité des salmonidés.

Je me fais le relai de Didier Pruneau avec cet article ci-dessous. Bonne lecture.

En 2015, j’ai écrit un article qui impliquait l’épandage de lisier et la charge azotée en résultant, comme cause majeure du développement du champignon Saprolegnia parasitica chez la truite et l’ombre dans les rivières Loue, Doubs, Cusancin, et Dessoubre. Dix ans après, je souhaitais faire un point sur les données scientifiques nouvelles permettant de comprendre un peu mieux les causes d’infection par Saprolegnia parasitica, maladie fongique qui loin d’avoir diminuée continue de faire des ravages dans les rivières karstiques de Franche-Comté.
Il est aujourd’hui établi que le développement de l’oomycète Saprolegnia parasitica est systématiquement associé à la mortalité des truites et ombres des rivières de Franche-Comté (par ex. Loue, Doubs, Cusancin, et Dessoubre). Ce champignon naturellement présent dans les cours d’eau attaque généralement des poissons affaiblis physiquement et immunologiquement. Ainsi, la fraie conduit à des abrasions de la peau favorisant l’infection fongique et entraine une baisse de l’immunité. Mais hélas en Franche-Comté, la mortalité se poursuit bien au-delà de cette période et des poissons malades peuvent être observés toute l’année avec toutefois, un pic entre janvier et avril. Plusieurs études ont été conduites visant à déterminer les causes de la dégradation écologique de la Loue et du Doubs. Les conclusions d’un travail important conduit par PM Badot et F Degiorgi (Université de Besançon) sur la Loue de 2012 à 2018 sont les suivantes :

« Les dysfonctionnements écologiques mis en évidence dans la Loue sont induits principalement par les causes suivantes:

1. Les excès d'azote dans les milieux aquatiques et l'accroissement des teneurs en bicarbonates sont la conséquence de l'intensification des pratiques agricoles.
2. Les contaminations multiples par des produits phytosanitaires, des biocides et les substances actives issues des médicaments vétérinaires sont elles aussi en partie liées à l'intensification de l'agriculture.
3. Une part sans doute non négligeable de ces contaminations trouve aussi son origine au sein de la filière bois par le biais des traitements des grumes en forêt et en scierie, mais aussi dans les utilisations domestiques (insecticides en poudre, en aérosol, biocides en tout genre, produits de traitement des bois d’œuvre...).
4. La collecte et le traitement des eaux usées ne sont pas impliqués au premier chef dans les contaminations azotées mais présentent des marges de progression pour réduire leurs contributions aux apports de substances toxiques et de bouffées de phosphore dans les cours d'eau.
5. Une contamination par des concentrations parfois très élevées d'hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) lourds non solubles existe à l’échelle du bassin versant dans les différents types de prélèvements analysés et notamment dans les particules fines (sédiments et matières en suspension).
6. La nature karstique du substratum et le positionnement en tête de bassin accroît la vulnérabilité des cours d'eau, vis à vis des contaminants chimiques qui peuvent être transférés des sols vers les eaux et transportés très rapidement au sein des masses d'eau.
7. Les modifications physiques des cours d'eau et les altérations de la végétation de bordure – réduite et artificialisée – dégradent les habitats des poissons et des communautés vivant au fond et constituent des facteurs aggravants. »
Selon PM Badot en 2020: « Les quantités d’effluents d’élevage épandus sur les prairies ont augmenté car la productivité du troupeau s’est améliorée : de 4000 kg/an de lait par vache en 1960 à 7000 kg/an au début des années 2000. Cela s’accompagne aussi d’un recours plus important aux engrais. Des épandages qui ne tiennent pas encore assez compte de la nature du sol. Quand il est superficiel, c’est-à-dire peu épais, ou quand la végétation, c’est à dire l’herbe n’est pas en croissance active pendant l’automne et l’hiver, ces intrants ne sont pas assez assimilés et se retrouvent dans la rivière. D’où le constat d’un excès d’azote dans les milieux aquatiques, qui favorisent les croissances végétales dans la rivière. ». « La pratique revient à fertiliser, engraisser la rivière et pas la prairie ».

Le projet NUTRI-karst d’une durée de cinq ans et terminé en 2024 avait pour objectif de comprendre l’impact des activités humaines sur les transferts d’eau et de nutriments dans les bassins karstiques du massif du Jura. S’il est difficile de résumer l’ensemble des données collectées du fait de leur nombre et complexité, une des principales conclusions est rapportée ci-après :
« Dans un contexte où une intensification des sécheresses estivales est attendue, les perspectives portent alors vers une augmentation de l’intensité du lessivage de l’azote si rien n’est fait pour en diminuer les apports. Aussi, il apparait donc plus que nécessaire de redoubler d’efforts sur la réduction des apports de nutriments, du fait de l’influence des sécheresses sur la mobilisation et le transfert d’azote vers les eaux ; notamment dans un contexte de réchauffement climatique qui risque d’accentuer le risque d’eutrophisation des cours d’eau. » J’avais précédemment évoqué il y a dix ans le rôle potentiel de la charge azotée (en particulier la forme ammoniacale del’azote) dans le développement de Saprolegnia parasitica, sans exclure d’autres sources de pollution renforçant l’affaiblissement des poissons. Que sait-on de nouveau ?
Rien, si l’on considère que la grand majorité des études conduites sur la saprolégniose visent à étudier des inhibiteurs de cette maladie dans le but de protéger l’aquaculture. Signalons toutefois une étude récente (Pavic et al., 2022) rapportant une méthode rapide, sensible et spécifique permettant de mesurer la distribution et la prévalence de S. parasitica dans l’environnement, notamment dans l’eau des rivières. Cette méthode utilise la technique de « droplet digital PCR (ddPCR) », technique maitrisée dans la majorité des laboratoires. Les chercheurs ont ainsi montré que S. parasitica était largement et naturellement présent dans les rivières de Croatie. Par ailleurs, ils ont montré que le taux de S. parasitica dans l’eau augmentait avec la conductivité électrique. Or, l’augmentation de conductivité électrique est largement documentée dans les rivières de milieu karstique telles que la Loue, où elle est progressivement passée de 250 µs/cm dans les années 70 à 470 µs/cm en 2014 (Conseil Scientifique du comité de Bassin Rhône-Méditerranée, 2015). Ceci résulte de l’augmentation des taux de calcium et bicarbonates dans l’eau. Il a aussi été observé que S. parasitica était présente sur la peau des truites mais que les taux étaient largement augmentés sur la peau comportant des lésions, ceci étant cohérent avec la mortalité post-fraie. Enfin, les taux de nitrates ne semblent pas influer sur les concentrations de S. parasitica.

En conclusion, plusieurs études confirment, s’il en était besoin, que l’état écologique des rivières de Franche-Comté s’est fortement dégradé du fait des activités anthropiques. L’excès de charge azotée est essentiellement du aux activités agricoles en particulier l’élevage bovin. Ceci est largement documenté dans les études menées depuis 2010. Les seuls éléments nouveaux concernant S. parasitica par rapport à l’étude que j’avais produite en 2015 sont la possibilité de mesurer de façon fiable les taux de cet oomycète dans l’environnement, et la démonstration que la conductivité électrique est corrélée avec les taux de S. parasitica dans les rivières. A ma connaissance, rien de nouveau n’a été, hélas, publié pour ce qui concerne le ou les éléments présents dans l’eau susceptibles d’entrainer et/ou potentialiser l’infection par S. parasitica.
Enfin, j’ajoute que les méthodes d’épandage de lisier se modifient avec l’abandon de la buse-palette (projection aérienne en éventail) au profit de matériel de type pendillards ou enfouisseurs/injecteurs. L’épandage classique par buse-palette entraine jusqu’à 50% de perte de l’azote ammoniacal par évaporation. Le matériel de type pendillards et le matériel de type enfouisseurs réduisent respectivement de 30 à 55% et de 60 à 95% l’émission d’ammoniaque (NH3). Ainsi, la quantité de NH3 dans le sol pour un même volume de lisier épandu va-t-elle considérablement augmenter…et, par conséquent, l’impact sur nos rivières.
Didier Pruneau, 5 mars 2025

Sources :
Étude de l’état de santé des rivières karstiques en relation avec les pressions anthropiques sur leurs bassins versants -François Degiorgi, Pierre-Marie Badot. Laboratoire Chrono-environnement - CNRS - UFC (UMR 6249). 2020, pp.47 https://hal.science/hal-04764319v1
L’état de la Loue : Avis sur les Recherches et les Etudes en cours menées sur la rivière et son bassin versant. Juillet 2015. Conseil Scientifique du Comité de Bassin Rhône-Méditerranée (Président B. Chastan).
NUTRI-Karst : Charlier J-B, Tourenne D, Hévin G, Desprats J-F. Réponse des agro-hydro-systèmes du Jura face au changement climatique et aux activités anthropiques. Rapport final de la Tâche 1. BRGM/RP-72229-FR, Version 1 du 18 novembre 2022.
Pavic D, Grbin D, Hudina S, Prosenc Zmrzljac U, Miljanovic A, Kosir R, Varga F, Curko J, Marcic Z, Bielen A. Tracing the oomycete pathogen Saprolegnia parasitica in aquaculture and the environment. Scientific Reports. 12, 16646, 2022.

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