STEP de Montigny, la preuve du désaveu envers les milieux aquatiques.
Par Nicolas39 le dimanche 19 mars 2023, 04:17 - Gestion piscicole - Lien permanent
Le long épisode judiciaire de la Station d'épuration de Montigny vient de se terminer.
Si vous êtes comme moi passionné de la rivière d'Ain, vous vous souvenez de cet été tragique de l'année 2010. Je vous fais un petit récapitulatif. Fin juillet 2010, les pêcheurs (encore et toujours eux) alertent sur des mortalités importantes de truites et d'ombres sur les secteurs avals de la rivière d'Ain jurassienne. Il s'agit là des linéaires de Villard, Châtillon, etc...L'ampleur des mortalités est immense. A tel point que la pêche sera fermée dès le 27 août de cette année 2010 et que cette fermeture sera reconduite pour toute l'année 2011 sur un linéaire de 9 kilomètres entre Montigny et Blye. Vous noterez qu'une fois de plus, seuls les pêcheurs ont été punis alors que c'est eux qui dénoncent ! L'histoire se répète !
On pense régulièrement à la Loue, le Doubs ou encore la Bienne pour ces mortalités massives mais la rivière d'Ain a énormément souffert lors cet épisode. Le pire dans cette histoire, c'est que cette pollution était préméditée ! Son origine était due à un rejet massif de phosphore par la STEP (station d'épuration) de Montigny gérée par l'entreprise Veolia sous l'égide de la communauté de communes Champagnole/Nozeroy Jura. Veolia avait unilatéralement décidé de ne plus traiter ce phosphore, suite à un différend avec la collectivité pour la prise en charge financière des boues générées par le traitement de cet apport massif de substance par l'entreprise Jura Terroir (Coop fruitière à Comté de Pont-du-Navoy). Il faut savoir que l'arrêté préfectoral d'autorisation de fonctionnement prévoyait un rejet maximum de 2 kg/j, seuil dépassé durant plusieurs semaines de plus de 10 fois, générant un développement massif de cyanobactéries à l'origine de l'importante mortalité de la faune aquatique à l'aval de la STEP. C'est finalement une pollution réfléchie et préméditée !
Un préjudice écologique de l'ordre 230 000 euros calculé selon la méthode Léger-Huet et Arrignon avait été demandé suite à une plainte déposée par la fédération de pêche du Jura ainsi que les deux AAPPMA concernées en novembre 2010. Voilà pour l'historique.
Cette procédure n'a que trop duré. Ce qui fait le jeu des prévenus au final. Elle s'est terminée il y a quelques semaines. La fédération ayant changé son fusil d'épaule en négociant un accord avec Veolia à hauteur de 30 000 euros. Fin rideau !
Mon analyse tout à fait personnelle de cet évènement est qu'il est facile de comprendre que le nouveau bureau fédéral a souhaité fermer ce dossier en se faisant rembourser ses frais d'avocat accumulés depuis 2010 et ce dans le but de passer à autre chose. En clair, Veolia, comme le reste des prévenus, s'en sort sans condamnation ! Ils ont fait le choix délibéré de ne plus traiter le phosphore avec les conséquences que l'on connait aujourd'hui et finalement rien ! C'est tellement scandaleux que je n'ai pas les mots.
Dans tous les cas, ces 230 000 euros évalués n'auraient pas refait revenir les truites. C'est évident. Mais il était de mon point de vue primordial d'aller au bout des choses pour envoyer un signal fort afin de démontrer que nous sommes dans notre role en défendant bec et ongles les milieux aquatiques de toutes agressions. Qui plus est dans ces proportions dramatiques de mortalités. Un autre choix a été fait. Je suis une nouvelle fois très déçu pour ne pas dire plus.
En terme de condamnation j'aurais préféré que la demande soit une mise en place d'un contrôle des eaux hebdomadaire en sortie de STEP sur X années. Contrôles et analyses réalisées par un laboratoire totalement indépendant avec une mise à disposition des données afin de mettre une pression permanente sur Veolia. Tout cela financé par les prévenus si tant est que la procédure aille à son terme et qu'ils soient condamnés ! Ce que veulent les amoureux des rivières au final, ce n'est pas de l'argent, mais avant tout chose être certain que l'eau qui ressort de ces installations soit de bonne qualité. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, loin de là, sur ce secteur comme sur d'autres.
Oui, car l'historique est très lourd pour Veolia comme pour la communauté de communes sur le secteur de la haute rivière d'Ain. Que dire de la lagune de Crotenay où plainte a été déposée également sans qu'une condamnation ne fasse suite. Pourtant, ce rejet puant et nauséabond qui se jette dans la rivière d'Ain n'est pas un mirage !
On peut aussi dénombrer les nombreux dysfonctionnements de la station d'épuration de Champagnole. Même pas de plainte pour cette installation. Quoi de plus normal quand on connait les liens qui lient les hommes concernés par les décisions.
La rivière d'Ain, comme d'autres, subit depuis des années des agressions importantes non punies. Il y a eu des choix de fait à l'époque. il y a des choix fait aujourd'hui. C'est tellement triste pour cette rivière. On en parlait encore hier avec mon jeune ami Victor au bord de l'eau en se demandant ce que l'on faisait encore là à traquer du vide. Car c'est ça aujourd'hui la rivière d'Ain, du vide !
Quand on connait l'historique des combats menés ou pas, on est en droit de se demander s'il faut conserver dans les statuts fédéraux la protection des milieux aquatiques comme on est en droit de ne plus croire en la justice. Sincèrement. Chacun fera sa propre conclusion, le mienne est faite.
Commentaires
Bonjour Nicolas,
Évidemment, je partage ton dégoût quant à l'impunité accordée aux pollueurs par les institutions censées défendre les milieux et accessoirement l'intérêt des pêcheurs.
En bord de Sorgues c'est du copier/coller. La seule différence c'est qu'on ne produit pas de comté mais de la gélatine dans une jolie petite usine. Historiquement, seul l'aval de l'usine était pollué (mais bien comme il faut). Certainement que ces rejets étaient trop visibles donc ils ont réduit les rejets directs. Mais il fallait bien trouver un débouché pour les boues issues du traitement. Donc un accord a été trouvé avec les agriculteurs du plateau d'Albion pour épandre ces boues sur leurs terres. Excellente idée car vu la nature karstique des sols tu peux en remettre tous les ans, à chaque pluie c'est lessivé...
Petit détail : le réseau souterrain constituant la Sorgue nait sous le plateau d'Albion.
Bon pour faire court, un arrêté préfectoral de 2003 autorise cette ineptie donc tout le monde est tranquille. Peut être même qu'une étude a été faite à l'époque pour juger de l'impact de ces rejets sauf qu'aujourd'hui il tombe 3 fois moins d'eau....On continue pourtant !
désolant mais rien de surprenant avec a la tete de la fédération un président complétement a coté de la plaque ce gars n a pas la meme vision des choses que nous pécheur c est un politicard
avec tes propos on sent très bien ta déception voire ton dégout mais quelle triste fin pour cette rivière qui les années passants en arrive malheureusement au bout du bout du néant ! eh oui le nerf de la guerre ( € ) est entrain de la tuer ses années sont comptées et je suis aussi triste que toi
bonjour Nicolas,
sur le site de la fédé 39, on peut voir que celle-ci dispose en capitaux propres au bilan de clôture de l'exercice 2020 de 2 005 339,00 €.
les dépenses de l'exercice 2020: 754 181,56, les recettes 770 472,40, donc légèrement excédentaires. Cette trésorerie peut donc être utilisée sans grand risque pour le fonctionnement "normal".
Les affaires juridiques sont complexes et nécessitent de recourir à des cabinets d'avocats spécialisés dans le domaine environnemental . Ces dossiers sont hélas récurrents et une association avec les fédés de la région pour agir en justice permettrait d'être plus efficace sur ces dossiers.Je m'étais impliqué avec le Pic Noir et nous avions confié le dossier au cabinet parisien de Corinne Lepage. Parmis tous les recours exercés en France contre les centers parc, nous sommes les seuls à avoir obtenu l'annulation du projet.Ce précédent à peut-être participéà l'abandon par P&V de tous ses projets sur le territoire français.. Avec de bons avocats il est possible de gagner
@tolemann : Merci pour ton retour Alain. Oui, tout le monde pensait que c'était impossible d'aller au bout pour le center parc, et pourtant...Il faut croire qu'il n'y avait pas la même envie pour faire flancher Veolia sur ce dossier...