Le long épisode judiciaire de la Station d'épuration de Montigny vient de se terminer.

Si vous êtes comme moi passionné de la rivière d'Ain, vous vous souvenez de cet été tragique de l'année 2010. Je vous fais un petit récapitulatif. Fin juillet 2010, les pêcheurs (encore et toujours eux) alertent sur des mortalités importantes de truites et d'ombres sur les secteurs avals de la rivière d'Ain jurassienne. Il s'agit là des linéaires de Villard, Châtillon, etc...L'ampleur des mortalités est immense. A tel point que la pêche sera fermée dès le 27 août de cette année 2010 et que cette fermeture sera reconduite pour toute l'année 2011 sur un linéaire de 9 kilomètres entre Montigny et Blye. Vous noterez qu'une fois de plus, seuls les pêcheurs ont été punis alors que c'est eux qui dénoncent ! L'histoire se répète ! 

On pense régulièrement à la Loue, le Doubs ou encore la Bienne pour ces mortalités massives mais la rivière d'Ain a énormément souffert lors cet épisode. Le pire dans cette histoire, c'est que cette pollution était préméditée ! Son origine était due à un rejet massif de phosphore par la STEP (station d'épuration) de Montigny gérée par l'entreprise Veolia sous l'égide de la communauté de communes Champagnole/Nozeroy Jura. Veolia avait unilatéralement décidé de ne plus traiter ce phosphore, suite à un différend avec la collectivité pour la prise en charge financière des boues générées par le traitement de cet apport massif de substance par l'entreprise Jura Terroir (Coop fruitière à Comté de Pont-du-Navoy). Il faut savoir que l'arrêté préfectoral d'autorisation de fonctionnement prévoyait un rejet maximum de 2 kg/j, seuil dépassé durant plusieurs semaines de plus de 10 fois, générant un développement massif de cyanobactéries à l'origine de l'importante mortalité de la faune aquatique à l'aval de la STEP. C'est finalement une pollution réfléchie et préméditée ! 

Un préjudice écologique de l'ordre 230 000 euros calculé selon la méthode Léger-Huet et Arrignon avait été demandé suite à une plainte déposée par la fédération de pêche du Jura ainsi que les deux AAPPMA concernées en novembre 2010. Voilà pour l'historique.

Cette procédure n'a que trop duré. Ce qui fait le jeu des prévenus au final. Elle s'est terminée il y a quelques semaines. La fédération ayant changé son fusil d'épaule en négociant un accord avec Veolia à hauteur de 30 000 euros. Fin rideau !

Mon analyse tout à fait personnelle de cet évènement est qu'il est facile de comprendre que le nouveau bureau fédéral a souhaité fermer ce dossier en se faisant rembourser ses frais d'avocat accumulés depuis 2010 et ce dans le but de passer à autre chose. En clair, Veolia, comme le reste des prévenus, s'en sort sans condamnation ! Ils ont fait le choix délibéré de ne plus traiter le phosphore avec les conséquences que l'on connait aujourd'hui et finalement rien ! C'est tellement scandaleux que je n'ai pas les mots.

Dans tous les cas, ces 230 000 euros évalués n'auraient pas refait revenir les truites. C'est évident. Mais il était de mon point de vue primordial d'aller au bout des choses pour envoyer un signal fort afin de démontrer que nous sommes dans notre role en défendant bec et ongles les milieux aquatiques de toutes agressions. Qui plus est dans ces proportions dramatiques de mortalités. Un autre choix a été fait. Je suis une nouvelle fois très déçu pour ne pas dire plus.

En terme de condamnation j'aurais préféré que la demande soit une mise en place d'un contrôle des eaux hebdomadaire en sortie de STEP sur X années. Contrôles et analyses réalisées par un laboratoire totalement indépendant avec une mise à disposition des données afin de mettre une pression permanente sur Veolia. Tout cela financé par les prévenus si tant est que la procédure aille à son terme et qu'ils soient condamnés ! Ce que veulent les amoureux des rivières au final, ce n'est pas de l'argent, mais avant tout chose être certain que l'eau qui ressort de ces installations soit de bonne qualité. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, loin de là, sur ce secteur comme sur d'autres.

Oui, car l'historique est très lourd pour Veolia comme pour la communauté de communes sur le secteur de la haute rivière d'Ain. Que dire de la lagune de Crotenay où plainte a été déposée également sans qu'une condamnation ne fasse suite. Pourtant, ce rejet puant et nauséabond qui se jette dans la rivière d'Ain n'est pas un mirage !

On peut aussi dénombrer les nombreux dysfonctionnements de la station d'épuration de Champagnole. Même pas de plainte pour cette installation. Quoi de plus normal quand on connait les liens qui lient les hommes concernés par les décisions.

La rivière d'Ain, comme d'autres, subit depuis des années des agressions importantes non punies. Il y a eu des choix de fait à l'époque. il y a des choix fait aujourd'hui. C'est tellement triste pour cette rivière. On en parlait encore hier avec mon jeune ami Victor au bord de l'eau en se demandant ce que l'on faisait encore là à traquer du vide. Car c'est ça aujourd'hui la rivière d'Ain, du vide !

Quand on connait l'historique des combats menés ou pas, on est en droit de se demander s'il faut conserver dans les statuts fédéraux la protection des milieux aquatiques comme on est en droit de ne plus croire en la justice. Sincèrement. Chacun fera sa propre conclusion, le mienne est faite.