La pêche en nymphe à vue fait certainement partie des techniques de pêche à la mouche où il y a le plus d’aprioris. Que cela soit pour le matériel, l’approche ou le choix des imitations que l’on va nouer au bout de notre fil. C’est sur ce dernier thème que je vais m’attarder sur cet article et plus particulièrement, sur la taille des imitations elles-mêmes. Bien entendu, mes écrits sont très largement influencés par mon expérience personnelle et à fortiori, par les rivières que je pratique, celles de Franche-Comté.Cela ne veut pas dire que l’on ne peut pas l’appliquer à d’autres régions, bien au contraire.

La grande majorité des pêcheurs de nos jours pêchent en nymphe à vue avec des imitations trop petites, j’en suis persuadé. J’avance cette affirmation très sereinement puisque moi aussi, pendant de longues années, je me suis borné à pêcher avec de petites, voir de très petites nymphes et uniquement cela.  C’est une erreur pour plusieurs raisons. 

Truite ayant succombé à une belle bouchée.

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  • Les insectes naturels sont souvent de belle taille…

Tout d’abord, il suffit d’observer attentivement la taille des insectes naturels, que cela soit pour les larves ou pour les crustacés comme le gammare qui est le plus connu.Par curiosité, mettez à côté d’un trichoptère ou une larve d’hepta un hameçon de 16 ou 18 qui sont les tailles les plus communes, on comprend très vite que ce n’est pas possible. En règle générale, les insectes que l’on trouve jusqu’à fin Juin voir même la mi-juillet, s’apparentent plus à de jolies bouchées qu’à des petites miettes.Alors, il y a ces fameux aprioris qui font que la majorité des pêcheurs utilisent des nymphes montées sur des hameçons de 16, vois même 18 dès le début de saison.

Je le répète, dans 90% des cas, sur les premiers mois qui suivent l’ouverture de la truite, on a forcément des gros insectes qu’il faudra imiter le plus souvent sur des hameçons de taille 12 à 14.

Pour comprendre, on peut regarder ce que font les pêcheurs aux appâts naturels. Les hameçons qu’ils utilisent pour escher les portes bois ou autre patraques varient là aussi entre 12 et 14. C’est les tailles adaptées à ce qu’ils trouvent sous les cailloux tout simplement.

Il y a de rares cas particuliers où même au printemps, il faut utiliser du petit, et encore…Lorsqu’une éclosion de chironomes à lieu, si toutefois vous vous trouvez vers une zone de rivière plus ou moins en état. En effet, les truites en sont très friandes et là, bien souvent, il faut avoir des nymphes assez petites.On rencontre le plus souvent ce genre de situations en aval d’une sortie de station d’épuration par exemple.

Mais autrement, il ne faut pas chercher bien longtemps. Au printemps, les eaux sont encore froides et les truites de sortent pas pour faire de la figuration. Quand ces dames sont sorties, c’est pour casser la croûte et parce que les larves du moment sont en mouvement. Dans les plus connues, on a les éclosions de cul-vert qui rendent les truites folles.On peut les voir entre deux eaux pour nympher, capables de se déplacer de plusieurs mètres pour attraper leur proie.Il y a aussi l’époque des mouches de mai, où là, les hameçons de taille 12 sont même petits, il faut du 10 dans ces cas là. Les gammares sont aussi à imiter sur de gros hameçons.  Regarder, mettez en dans le creux de votre main, comparez, vous aller comprendre très vite…

Les fameux gammares...

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Alors quand je vois un pêcheur attaquer une truite dans ces cas là avec une petite pheasant-tail en 18, je me dis qu’il n’a pas compris. Cela ne veut pas dire qu’il ne va pas prendre la truite ciblée, mais il n’aura pas tous les conforts qui accompagnent la pêche avec ces grosses nymphes et il diminuera, de mon point de vue, ces chances de succès.

  • Plus facile avec de grosses nymphes…

Et oui, c’est nettement plus facile pour plusieurs raisons. Tout d’abord, pour visualiser l’instant du ferrage. Cela me parait évident. Une truite fera dans la plupart des cas un mouvement plus facilement repérable par le pêcheur pour engamer une grosse nymphe. De plus, et je l’ai observé plus d’une fois, les nymphes imposantes déclenchent des attaques à plus grandes distances.Dans le cas des cul-vert par exemple, il n’est même pas nécessaire d’animer. Une belle dérive inerte avec un passage à un, voir deux mètres de la truite lui fera déclencher une attaque sur l’imitation, et là, quel confort pour le ferrage, on voit tout et bien mieux.

Le deuxième gros avantage, c’est qu’avec de grosses nymphes, on peut rester avec des fils de diamètres conséquents en pointe, ce qui n’est pas le cas avec une nymphe montée sur hameçon de 22, difficile de mettre un 16 centièmes dessus auquel cas, la dérive de votre imitation sera une catastrophe. Hormis la période estivale et les basses eaux, je ne descends jamais en dessous de 12 centièmes, et je pêche le plus souvent en 14 centièmes et même 16 centièmes en tout début de saison. Les grosses nymphes le permettent, il ne faut surtout pas s’en priver. De plus, cela permet d’abréger grandement les combats avec les poissons.

Le troisième et dernier avantage est qu’il y a beaucoup de pertes sur les beaux poissons. J’entends beaux poissons à partir du kilo. Un gros hameçon à une plus grande ouverture et une solidité supérieure. Moins de décrochages, moins d’hameçons qui s’ouvrent… Une très belle truite sur un hameçon de petite taille, c’est toujours à la limite et bien souvent, cela bascule au-delà pour terminer en échec à l’approche de la fin du combat.

Vous ne regretterez pas l'emploi de grosses nymphes.

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  • Inciter un poisson éduqué…

Alors vous allez me dire, ok, des grosses nymphes pour le printemps, mais à partir de fin juin, il faut des choses microscopiques pour leurrer les truites qui en ont vu de toutes les couleurs depuis mars. A cette question, je répondrai « pas forcément ». L’été, il est évident que les éclosions qui se font beaucoup plus rares, nous apportent des insectes de petites tailles la plupart du temps, c’est un fait.

Pour moi, il y a deux cas de figure. Si vous pêcher des secteurs, et c’est de plus en plus rare, peu ou pas pêchés, alors, des nymphes classiques, correspondant à la taille des insectes du moment auront un très bon rendement sans problème.

Si vous pratiquer des secteurs où les poissons sont très éduqués à cause d’une pression de pêche très élevée, et bien faire différemment des autres peut s’avérer payant et plus souvent que vous ne le pensez. Effectivement, avec les eaux basses, les pêcheurs diminuent à la fois les diamètres de fils et les tailles d’hameçons comme un réflexe.On peut souvent observer des pratiquants de la nymphe à vue avoir une nymphe montée sur un hameçon de 18 à 22 au bout de leur pointe en 8 centièmes l’été. C’est une technique très efficace lorsqu’on la maitrise parfaitement, ce qui est loin d’être donné à tout le monde. Malgré tout, on tombe toujours sur des poissons « intordables » comme on dit. Dans ces cas là, il ne faut pas hésiter à sortir une grosse nymphe pour proposer quelque chose de différent à la truite. On arrive fréquemment à faire mordre des truites en plein été sur des nymphes hameçon de 12 voir 10 pour la simple et bonne raison que ces truites sont formatées au petites imitations.Une truite, à la base, il faut bien le reconnaître, n’est pas forcément un poisson très intelligent. J’entends par là, et il suffit de prendre cet exemple, que si vous pêchiez une réserve où les truites sont tranquilles depuis quelques années, c’est la pêche du siècle assurée. Mais par contre, on arrive très bien à les éduquer par nos façons de les aborder. Cherchez à faire les choses d’une autre manière, à vous démarquez de ce qui se fait globalement et vous aurez de belles surprises….

Pour information, vous pouvez retrouver cet article dans le numéro 25 du magazine le monde la truite.