Depuis pas mal d'années et ce dans la grande majorité des régions françaises, la fermeture de la pêche de la truite se fait au troisième dimanche de septembre. Quelques régions de montagne font les prolongations jusqu’à début octobre. Nous avons aussi connu cela par le passé dans le Jura avec une fermeture au premier dimanche d’octobre. Entre les deux, il y a la francosuisse avec sa fermeture au 30 septembre quelque soit le jour. Ces rappels en guise d'introduction à une réflexion personnelle.

Pour le Jura, c’est donc le troisième dimanche de septembre. Soit le 15 du mois au plus tôt (dans le cas où le 1er est un dimanche), ou le 21 du mois au plus tard. Selon les avis de chacun, cette date est une bonne chose ou pas. Une partie des pêcheurs la trouve trop précoce car ils aimeraient pêcher plus longtemps. De mon point de vue, c’est très bien ainsi au contraire. Je ne voudrais surtout pas que cela change. Je vais m’en expliquer dans les lignes qui vont suivre. À noter que je ne me permettrais pas d’extrapoler mon ressenti à toutes les régions de notre pays. Non, je me base sur mes observations effectuées sur la haute rivière d’Ain et uniquement de cela. Il est tout à fait possible que cela soit bien différent ailleurs. Mais chez nous, je me répète, c’est à mon avis parfait comme ça.

J’ai souhaité écrire ces quelques lignes car j’entends souvent autour de moi que la pêche de la truite ferme trop tôt. Que l’on pourrait profiter des belles journées d’automne avec des truites redevenues actives sans être préoccupées par la période de reproduction. C’est vrai, je ne peux pas aller contre ça. C'est tout à fait exact...En apparence. Il me semble que ces arguments ne sont là que pour défendre le plaisir du pêcheur. À aucun moment il n’est question des truites et en particulier de leur cycle biologique. Certes, durant le mois d'octobre, sur la rivière d’Ain, les truites ne se reproduisent pas. Je peux sans prendre de risque vous garantir que pour les individus aptes à se reproduire, cette pensée est forcément omniprésente. Les semaines d’Octobre sont primordiales afin que les poissons se refassent une santé en s'alimentant à leur guise sans être dérangés. Ce mois apporte les dernières éclosions massives et fait sortir les poissons parfois sur des durées de près de 5 heures. J’ai vu encore cette année des truites gober sans arrêt à s’en faire péter le bidon ! Bien entendu que ça donne envie d’aller chercher la canne mais pensons à la truite avant tout et à nos futures parties de pêche. Il faut que ces poissons arrivent en pleine forme le jour J. Je pense donc qu'il faille leur laisser quelques semaines sans pression de pêche avant cela. Ce n'est pas Novembre qui apportera les éclosions nécessaires. De plus,en Novembre, les truites ont déjà basculées en mode reproduction. Non, Octobre est le mois du renouveau.

Cette année 2021 où Juillet fut exceptionnel reste à part. Mais les truites depuis 2015 arrivent en septembre avec un état de forme plutôt médiocre. Les étés sont longs, chauds et secs. La nourriture est rare. Les éclosions quasiment absentes du fait d’un couvert d’algues sur les fonds. Le début de l’automne voit la température de l’eau redescendre. Avec un peu de chance, il y a un petit coup d’eau pour nettoyer les fonds. Ainsi, les truites ont de nouveau quelques semaines pour refaire le stock de graisse avant la grande période de reproduction qui est énergivore au possible. Novembre annonce les premiers rassemblements voir les remontées parfois sur de longues distances des cours d’eau et autres petits affluents. Décembre voit les premiers combats pour les emplacements et les partenaires. Sans oublier les efforts pour la construction du nid et la dépose des œufs. Toute cette période qui peut s’étaler sur plusieurs semaines entame considérablement les forces des truites. Il faut obligatoirement des poissons en pleine santé pour braver ces épreuves et surtout pour en ressortir indemne.

Alors il est vrai que dans certains pays la pêche se pratique sur les truites bien plus longtemps que chez nous et que la reproduction a lieu malgré tout. Certes, mais les conditions sont certainement bien différentes de chez nous dans le Jura. Je sais parfaitement ce qui se passe chez moi et laisser quelques semaines aux truites pour se nourrir paisiblement avant la période la plus importante de l’année pour elles et pour nous, ce n’est pas un grand sacrifice me semble-t-il.

Finalement, ici, le seul inconvénient de la fermeture est que les oiseaux piscivores sont libres de pêcher comme bon leur semble. Et ça, c’est terrible. Il faut donc absolument continuer à faire acte de présence pour au minimum les faire fuir de votre linéaire. C'est ce que je fais depuis mi-septembre par exemple avec 4 à 5 sorties hebdomadaire. Je peux vous affirmer qu’à chaque sortie, j’en vois ! Harles ou cormorans, parfois les deux ! Cette prédation est sous évaluée, c'est certain. Quand vous voyez 4 harles avec chacun un ombre de 15-20 centimètres dans le bec, ça fait mal au cœur. Surtout quand vous imaginez que ces oiseaux vont revenir tous les jours durant automne et hiver...Forcément qu'il manque un grand nombre de poissons au printemps ! Malheureusement, la rivière est désertée par les pêcheurs une fois la pêche fermée. Ce que j’arrive à comprendre bien que...Pas complètement. Bien entendu, nous n’habitons pas tous à côté et nous n’avons pas tous la même passion pour la rivière. Mais quand même.

Pour conclure, et comme dit au début de ce billet, cette fermeture au troisième dimanche de septembre me convient parfaitement car pour moi, elle respecte le cycle biologique des truites afin qu'elles puissent se reproduire dans les meilleurs conditions chez nous. C'est un avis de pêcheur et observateur passionné de nos truites sauvages jurassiennes.

Mon fils lors de la fermeture 2021.