Aujourd’hui je reçois , excusez moi du peu, un invité de marque en la personne de Michel Flénet, Michou pour les intimes. C’est dire le bonheur que m’a apporté cette interview….qui sans nul doute, fera votre bonheur aussi ….alors je vous le laisse…

Nicolas Germain : Bien que tu sois mondialement connu, peux tu te présenter Michel s’il te plait ?

Michel Flenet : mondialement... Meuh non. !! Je suis seulement connu en Europe comme monteur de mouches artificielles !
Bon, j’ai 48 ans, célibataire, je réside à Mandeure à 300m du Doubs au Sud du pays de Montbéliard
Je travaille depuis 1981 comme technicien d’études Peugeot Motocycles au bureau Développements, Prototypes et Recherches .
Je suis titulaire de 3 CAP de carrossier, chaudronnier et dessinateur en chaudronnerie et tuyauterie industrielles

Les débuts

Interne à l’école des sourds de Cognin à Chambéry depuis l’age 7ans, je suis devenu entre 18 et 21 ans grâce à ma Renault 10 et à la découverte des nymphes, un excellent pêcheur des torrents savoyards au toc.



NG : La pêche tiens une place prépondérante dans ta vie, raconte nous un peu tes premiers pas aux bords de l’eau.

MF : heu heu mes premiers pas en fait, furent ……des tours de roue sur mon petit vélo blanc, cadeau de Noël de mes 7 ans avec lequel, équipé d’une canne en bambou trouvée dans la cave de ma mamie, je suis parti à la pêche sous un orage d’été.
Partie à ma recherche au retour de son travail ma mère ne trouva pas mon vélo au bord de l’eau…et pour cause…j’étais à l’abri sous le pont !!! Déjà futé, non
Pourquoi la pêche alors que dans ma famille on était plutôt chasseur que pêcheur ??

A 14 ans, pendant les vacances scolaires, c’était la pêche aux truites au ver à l’ouverture, aux barbeaux l’été, et aux coups du soir aux poissons blancs et parfois aux truites et aux ombres avec mon copain de classe résidant à Mathay à 3km , qui me prêtait de temps en temps sa canne à mouche et sa tresse parallèle graissée avec ses araignées préférées rousses à corps jaune : je m’initiais alors à la pêche à la mouche en sèche à vue sur les gobages à Bourguignon dans le Doubs !

Vers mes 17ans mes parents m’ont offert une Fenwick 8’ #4 et quelques sedges Suisses au corps en liège que le magasin de pêche à Pont de Roide avait conseillé à mon père.
Puis papa m’a emmené sous le Pont à St Hippolyte où j’ai pris quelques truites, un jour mémorable !!. J’ai alors poursuivi la mouche avec mon copain de Mathay à Pont de Roide où il y avait de beaux poissons et où nous faisions des concours de pêche rapide aux vandoises et surtout aux ablettes.

De 22 à 25 ans j’ai interrompu la pêche, je travaillais alors à Dijon et partageais mes loisirs entre la planche à voile, la plongée, la nage, la chasse sous marine en apnée, les cross country et le ski alpin.

Le Montage, les concours

NG : La pêche à la mouche t’as amené au montage de mouche, et dans ce domaine tu es un maître, quelles sont les raisons qui t-on donné envie d’aller toujours plus loin dans le montage ?

MF : Je n’ai repris la mouche qu’à 25 ans et me suis alors mis au montage !

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D’abord quelques mois avant j’ai été muté de Dijon à Mandeure au bord du Doubs
En raison d’une hépatite contractée à Noël 84, j’ai du me mettre au repos pour au moins 6 mois d’après mon médecin et j’ai du alors organiser mes loisirs en supprimant les sports trop rudes et c’est alors que je suis revenu à la pêche à la mouche!!!
J’ai récupéré les vielles revues de pêche au grenier, les ai feuilletées, et déchiré les pages sur la pêche à la mouche et le montage, pour m’apercevoir que je devais pouvoir monter moi-même mes artificielles et éviter d’avoir à les acheter en magasin
Ma mère m’a permis d’aller acheter un cou de coq roux, un étau et le petit matériel nécessaire pour débuter , puis petit à petit, j’ai acquis des cous gris, chinchilla, chinois bien sûr car bon marché, et des bobines de soie Gossamer.
J’ai ainsi commencé le montage 5 mois avant de reprendre la pratique de la palm en Mai 85 et j’ai monté des nymphes de Radix, des streamers, des sèches de JL Poirot, de De Chamberret et de Ragot , affreuses, bien sûr!!
J’ai monté mes mouches tous les après midis pendant ces 6 mois guidé par les revues Pêche Mouche, Plaisir de la Pêche ….. et par les petits livres de montage de Borlandelli et de Miramont ….
Je m’attachais surtout déjà à bien respecter les formes et silhouettes des mouches que je voyais sur les photos en recommençant sans cesse mes réalisations pour les corriger … !
En Mai 85 à peine remis de mon hépatite, le gérant du magasin de pêche lui même moucheur m’a m’emmené à l’école mouche de Jean Jacques Cuenin qui dès le premier soir a apprécié et présenté le modèle que j’avais monté à sa demande à ses élèves, et nous sommes devenus vite copains car nous nous comprenions bien !

J’ai découvert alors les magnifiques nymphes d’Erich Tolderer, les superbes sèches d’Ariel Nunez et me suis efforcé de les imiter.

Fin 85, j’avais la totale approbation de Cuenin qui me classait amicalement « hors concours » pour me conseiller ensuite de me présenter au concours de montage mouche du Jura organisé par André Terrier.

J’ai été classé premier au général et premier au concours de la plus belle mouche avec une récompense de rêve :faire voler un petit avion en double commande !!!

Il est pas beau notre Michel (on peut reconnaitre sur la Photo André Terrier, Maillard (mouches Devaux à l'époque), Michel Guillemin...)
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Article complet ici

Le secret est de ne jamais se satisfaire ses réalisations ni de ses succès aux concours, et de toujours essayer de mieux faire !!! Lors de mes premières démos mouches dans les salons et fêtes de pêche, les maîtres monteurs étaient là pour m’assister dans mes montages, me conseiller, et chacun m’a confié un ou deux trucs ….Avakian, Poirot, Bresson, Chignard, Nunez ….Merci à eux de m’avoir ainsi « porté » A moi maintenant de transmettre mes expériences, j’ai même filé des trucs à Misterhyde à Montselgues …. mais n’ai-je pas prêché dans le désert ?!Hihi !!

Quelques liens vers des articles consacrés à Michel à l'époque

Article de presse
Article de presse
Article de presse
Article de presse

NG : Les très bons monteurs sont aussi rares que les très bons pêcheurs, quelles qualités faut-il avoir pour arriver à un tel niveau ?

MF : Il faut travailler…J’ai monté une dizaine de mouches tous les soirs pendant au moins 2 ans, mais j’ai aussi investi 500ff par mois dans de nouveaux matériaux de qualité et de beaux livres de collection des maîtres tels que Skues, Gaidy et Manach ………….
Il faut monter, et encore monter des mouches, et participer aux concours en commençant par les régionaux pour arriver à présenter des mouches sans défauts face à des René Gros, Pascal Cognard, Jacques Boyko, Jean Marc Somaré, Bernard Marguet, Jean Luc Estublier , ..un contre tous…. !!

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IL faut sans cesse revenir en arrière pour bien vérifier la parfaite exécution de l’étape précédente à la poursuite du moindre défaut à corriger quitte à défaire le montage, avant de poursuivre par l’étape suivante, et aboutir ainsi à des montages de plus en plus soignés !

Ces corrections immédiates, pendant le montage sont extrêmement importantes pour arriver à un bon niveau, .surtout à cette époque où il n’y avait pas Internet ni les forums spécialisés pour se confronter et s’instruire !
C’est petit à petit qu’on arrive ensuite à ajouter des pattes, des yeux, sans défigurer les nymphes et les sèches à 4 ailes sur H n°18 !

J’ai constaté pendant 9 années au « Mustad », où j’ai été classé 3 fois deuxième, que l’approximation n’était pas de mise….jusqu’à accéder enfin en 1999 à la première place …j’ai alors arrêté cette folie des concours, folie car c’est le seul mot qui convient pour décrire le chemin à parcourir pour franchir les étapes jusqu’au plus haut niveau.. ! Quasiment suicidaire, mais je ne regrette pas, bien sûr…et rien à voir avec la pratique de la pêche !!

L’entomologie et la pêche

Plus gratifiant à mon sens fut par la suite mon approche des « bestioles aquatiques »…car j’ai passé ensuite autant de temps que j’en avais consacré au montage, à pêcher mais aussi à fouiller sous les racines, les herbiers, les mousses pour y débusquer tout ce petit monde vivant dont je ne connaissais pas encore les noms !!
Je me suis alors plongé dans mes livres pour y trouver les informations qui me manquaient, et suis reparti chaque année à la chasse aux éphémères et aux sedges dont j’apprenais l’habitat, les couleurs, la silhouette…d’autant que je suivais dans mon aquarium l’évolution des nymphes vers leur éclosion en passant des heures à les surveiller pour photographier ces instants magiques !!

Et durant les longues soirées d’hiver, je reproduisais par mes montages les artificielles correspondantes…. !

NG : En plus d’être un monteur hors pair, tu es également un très bon pêcheur, le Doubs Franco Suisse est ton jardin, parle nous un peu de ce lieu que tu aimes tant.

MF : Ah …non, je ne suis pas aussi bon pêcheur que monteur, je ne crois pas, je me considère plutôt comme un « pêcheur du dimanche ».mais je prends tellement de plaisir à pêcher, et à essayer de m’améliorer pour pêcher mieux !!

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Avec l’école ou seul, j’ai pêché un peu partout où il y a des truites. J’ai parcouru toute la Loue, les rivières des Vosges, la Haute et la Basse rivière d’ Ain ,la Haute Seine, Le Dessoubre, les rivières des Pyrénées avec JC Lacan et Nunez ………..

En général, noblesse oblige….j’ai pêché jusqu’en 2000 chez les maîtres monteurs pro et chez les gagnants des concours, et en diagonale du sud ouest : des Pyrénées et de Biarritz… au nord Est à Strasbourg … !

Revenons à nos moutons : piètre pêcheur face à mon maître Jean Jacques Cuenin, dit « l’araignée », qui pêche « plus vite que son ombre », me tient la main, me montre ses coins à grosses truites, me dit : « celle la va mordre… »..et que je regarde œuvrer , rapide, précis…il ferre… le poisson qu’il avait repéré et que moi je n’ai pas vu , distrait par une éphémère , quitte à me dire ..tu as vu , c’est avec ta nymphe tressée chocolat que je l’ai prise.., lui, c’est un vrai « preneur de truites » !!.
Encore pire à Goumois coté Suisse, face à Piam et à Cuenin : à deux mètres l’un de l’autre,… chacun avec la même nymphe……ombres : Piam = 5, Cuenin l’araignée = 2, moi = 0 !!

Grâce à mes rencontres avec d’authentiques grands pêcheurs, y compris à Goumois et chez Sansonnens, j’ai compris que la aussi, rien ne remplaçait la pratique, et que la pêche demandait précision, douceur et lenteur pour éviter les gestes brusques surtout en nymphe à vue et que cela pouvait s’acquérir….avec le temps… et il m’a fallu des années, !!

Mon jardin secret c’est toujours la Franco Suisse, à Goumois c’est mon paradis avec son Moulin du Plain de Pierre Choulet. Sur quelques Kms, on rencontre berges encaissées, longs herbiers, gravières, pools, lisses, courants, tous très poissonneux, sans compter les quelques grands pêcheurs présentés par Pierre !

Même si la pêche y est plus difficile qu’ailleurs, j’adore Goumois !! Qu’elles soient « de sortie ou pas », que je sois bredouille ou pas, je suis ravi d’être au bord de l’eau et ravi… d’être à la pêche à Goumois !
J’y fais rarement les coups du soir , car je n’ entends pas les gobages dans la nuit d’encre que je consacre à visiter des étoiles, nébuleuses, amas, galaxies, planètes pour les étudier avec mon télescope, mon troisième vice après la pêche et la photographie !

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Le San et la Mongolie sont des destinations que j’ai adoré, mais on ne compare pas Goumois ni la francoSuisse ni les rivières Franc Comtoises
Ces destinations prestigieuses et lointaines, c’est anecdotique, une folie passagère, un coup de foudre pour s’éclater et prendre des poissons en très grosse quantité , tout comme le record de Montselgues , mais la Loue, et Goumois, c’est la passion profonde, solide et durable…rien à voir avec le nombre des prises !!..

L'amour de Michel, c'est elle!!
L'amour de Michel, c'est elle!!!

Préservation des rivières

NG : Je te sais impliqué dans l’AAPPMA locale, as-tu des envies ou des craintes pour l’avenir de ta rivière ?

MF : Non je ne fais pas partie du comité d’AAPPMA, je ne peux pas parler comme il faut ni téléphoner.

Je préfère simplement apporter mon aide au besoin localement et à la Franco suisse par exemple pour les filets anti cormorans…mais je constate la raréfaction des beaux herbiers et des nymphes, alors que le Doubs et le Dessoubre ont connu les grosses pollutions, subi des modifications du fait de l’homme !
Les avertissements et les réclamations semblent sans effet au niveau de la bureaucratie, sont ils seulement enregistrés ??
Il y a très longtemps, que j’ai réclamé à Goumois l’augmentation de la maille !
M’avait on compris et enregistré ? Non.
Maintenant c’est fait. Merci à la majorité des moucheurs et à Triboulet fils.



Lors de mes débuts à Goumois, il y avait par endroits des groupes de 20 à 50 ombres et 10 ans plus tard il n’en restait plus que la moitié, et aujourd’hui il ne reste que 20% de ce que j’ai connu dans les années 1986 à 1990, il en est de même pour les truites qui ont disparu pour 60 à 70 % ! Mon ami Galliot l’ex-président d’AAPPMA du Dessoubre, grand défenseur et protecteur de sa rivière interdisait la mouche avant l’ouverture de l’ombre si fragile….il ne fut pas réélu et le Dessoubre est désormais quasiment vide de poissons, sauf dans les coins inaccessibles au Borne, km 0
Depuis 20 ans je ne peux, impuissant, que constater la dégradation et je crains pour l’avenir les déversements de purin à moins de 500m des cours d’eau, avec colmatage des fonds et disparition des nymphes et donc de la nourriture des poissons !
Quant aux parcours No Kill, ils devraient par rotation de 3 années concerner 1/3 ou ¼ des parcours au lieu d’1 ou 2 km voir de 800m !!

Je te souhaite Nicolas, à la tête de l’AAPPMA de Crotenay chez le bien aimé André Terrier bon courage pour améliorer au cours des années à venir , en priorité la qualité de l’eau et préserver ainsi la vie aquatique et la population piscicole , comme l’ont déjà tenté sur l’Ain jadis les grands de la Bresse et de Lyon !

Rencontres

NG : Ton parcours t’a fait rencontrer un grand nombre de pêcheurs exceptionnels, je suppose que ces rencontres et les amitiés qui en découlent font partie des moments forts de ta vie ?

MF : je peux dire grand merci à tous ceux que j’ai rencontrés et en compagnie desquels j’ai passé au bord de l’eau, mais également à table, des moments mémorables ….
Bresson le râleur pour qui les nymphes étaient « ces machins qui fouillent le fond de l’eau, Piam que j’ai rencontré un peu partout, Terrier dans les Vosges, le Jura et à Trept qu’il pêchait au bouchon à la Toulousaine, Somaré, Bertrand, également lors de compétitions et de petits tournois amicaux dans les réservoirs ou lors des salons, et au cours du championnat du monde dans les Vosges en 2002!
J’ai pu ainsi faire connaissance des grands français Saïd Yahiaoui, Bertrand Jacquemin, Roger Gentelet, Lachaize, Taillander et les autres « rigolos » de la Bresse
Encore merci à Jan Astier, …. Je garde également le souvenir de le rencontre en compagnie de Jean Paul Dessaigne, de madame Lee Wulf au lac du château de Gunter Klein en Normandie, et de beaucoup d’autres rencontres comme les Stancev ….et d’autres encore dont j’ai oublié les noms, et tous ceux auxquels j’ai présenté mes montages et mes nymphes tressées !!



Après avoir tant reçu de tous ces noms prestigieux, c’est maintenant mon plaisir de vous transmettre un peu de leur savoir en corrigeant vos défauts de montage via Mouche-fr, Flyfishing06, et le forum de l'archisèche , et de m’amuser avec vous, les obscurs, les sans grades… pour le seul plaisir d’être ensemble et de faire les fous au bord de l’eau…

VOYAGES

NG : Tu es un vrai globe trotter, quel est le pays où tu es allé qui t’as laissé le plus beau souvenir ?

MF : Mon premier saumon Irlandais est un souvenir impérissable….Jean Tessier de Plaisirs de la pêche, Dessaigne et Lacan qui m’accompagnaient sont accourus en m’entendant hurler…et .mon dernier est un saumon atlantique français sorti du Blavet cette année alors que je pêchais avec mon inséparable ami Jean Paul Dessaigne !

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Parmi les nombreuses destinations que j’ai connues, je préfère celles de l’hémisphère nord, à l’exception de mon paradis de l’île de la Réunion en raison de ses Mafates et de ses coryphènes !!

J’ai ainsi, en tant qu’invité pour présenter mes montages ou pour pêcher chez des amis, emmené mes cannes en Suisse, Italie, Espagne, Norvège en compagnie de Fabre Brice, Torill Kolbu, Dawy Wotton, en Irlande, au Quebec, au Sénégal, en Floride, et sur la Glomma en compagnie des plus grands monteurs.. !

Et pour mes vacances de pêche,, j’ai choisi l’ Allemagne, l’ Autriche, le San en Pologne, le Vermont aux USA , j’ai tâté de la Perche du Nil en Egypte, du Bonefishs à Cuba, du Taimen en Mongolie……sans oublier le tourisme pur en Grande Bretagne, Grèce et Canada !!




NG : En parlant de voyage, tu es systématiquement sur les routes pour diverses manifestations de montage, ton sens du partage n’a pas d’égal, qu’est ce qui te fait avancer ?

MF : Mon plus grand plaisir est celui des rencontres internationales où je suis en fait invité pour transmettre ce que je sais, où je retrouve des amis de longue date, et où je m’en fais de nouveaux…tout comme je m’en suis fait ici même avec vous …avec qui je continue d’apprendre…. !

Mon école, mon site, ma nymphe tressée

NG : Tu t’occupes également de ton école de montage de mouche, tu as un site Internet fabuleux Michel Flénet
Tu es présent sur plusieurs forum de pêche à la mouche, malgré ton handicap, la communication et le partage envers les autres n’a jamais eu de barrière pour toi, bien au contraire, tu le fais mieux que quiconque

MF : Ah bon, merci pour tes remarques…mais lors des démos, j’ai parfois du mal à communiquer, ce que je fais alors par écrit, ainsi que mes visiteurs Pour l’école, je suis président depuis 15 ans. Les nouveaux venus ne me comprennent pas toujours mais les anciens servent d’interprètes et petit à petit, on finit par se comprendre et pour les cours de montage, je distribue des fiches où je dessine chaque étape !

Autrefois avant Internet, beaucoup de mes questions restaient sans réponse…mais depuis, la communication, grâce aux forums, est devenue bien plus facile, et j’ai vite appris à échanger par cette voie les informations et à guider par mes indications et mes critiques le monteurs « en herbe », mais aussi à recevoir des avis multiples et ainsi apprendre encore bien des choses de la part de moucheurs dispersés aux quatre coins de l’horizon ..merci au progrès et merci à vous !!

NG : Michel, peux tu nous parler de tes boites de nymphes ? Est ce qu’il t’arrive de pêcher avec des nymphes toutes vilaines ou est ce que tu ne pêches qu’avec tes œuvres d’art ?

MF : Ce n’est pas la boîte à mouches qui fait la pêche… si vous voyez mes boîtes,…. c’est le bordel !! Mes nymphes tressées et perlas ne sont pas des œuvres d’art, elles ne sont pas faites pour être en vitrine sauf une qui a fait le tour du monde des musées depuis les USA jusqu’au JAPON !!

Les poissons affamés en quête de nourriture n’y verront que du feu , ils ne voient pas la différence entre les bonnes caricatures et les simplement « passables » , à condition de bien les présenter dans la bonne veine / couloir de courant où « ça se ferre tout seul ».

Comprenons que les grosses truites acceptent les Mepps n°4 ou 5, malgré ces monstrueux triples… or les nymphes sont en 7mm !
Mais beaucoup de poissons nympheurs préfèrent à une nymphe unicolore, les nymphes bi, tri colores ou d’une couleur en dégradé à condition de ne pas les surcharger, ni de les défigurer et pourvu qu’elles vibrent ou coulent bien !

Elle faisait 87.50cm



Je ne pêche pas avec des « vilaines » ou « affreuses » type Misterhyde, car il prétend…. que je ne sais pas les monter (hi hi).
Je ne veux pas monter exprès des moches, mais il m’arrive de faire des loupées au montage, et parfois ça marche, d’ailleurs les nymphes mâchouillées et abîmées par les truites sont encore plus efficaces !!!
J’utilise souvent des simples nymphes bien montées ainsi que mes tressées aussi simples que celles présentées sur mon site, mais également bien d’autres modèles innombrables qui ne figurent pas sur le site !
Je ne varie pas les plombages d’une même modèle…. chaque modèle a un poids invariable, c’est mon principe.
J’ai ainsi des nymphes à pattes peu lourdes, des nymphes vernies très lourdes, des nymphes à corps en quill, en herl de faisan, de héron (moyen), entièrement en dubbing pas ou peu plombées…… parfois je fais des faux plombages pour telle ou telle nymphe pour gonfler les corps sans les alourdir……. et mes noyées sont en général en grandes tailles

Faux plombage façon Michel Flénet

L’histoire de mes nymphes tressées : à Goumois, fausse montée sur une nymphe jaune, également sur une nymphe couleur rouille ou olive alors qu’en associant deux nymphes olive et jaune en tandem…..banco !!
J’ai bien mis un an à chercher comment installer mes deux couleurs (jaune et rouillé) sur le corps de la même nymphe comme sur les naturelles…. C’est en laçant mes chaussures que j’ai eu l’idée de tresser ainsi le corps sur la hampe de l’hameçon !
Un hiver j’ai présenté ma « duveteuse » au concours de plaisir de la pêche qu’elle a remporté ce qui m’a fait connaître des lecteurs de la revue ainsi que JP Dessaigne et Lacan de Perpignan, patrie de Joan Miquel, le cormoran Catalan !!

Une seconde fois je fus photographié, camescopé et videoscopé dans un hôtel empli de Japonais en tant qu’heureux gagnant du concours de montage qui avait pris 2 saumons en Irlande !
L’été suivant je teste ma nouvelle collection avec JJ Cuenin à Goumois et chez Sansonnens pour la réduire de 10 modèles à 4, et Cuenin me fait savoir que si je pêchais comme Piam avec ces nymphes tressées, je viderais la rivière mais heureusement…je suis trop distrait… !

Perspectives

NG : Tu fais partie de la « vielle école », que penses tu de la nouvelle génération qui arrive et comment voit tu l’avenir de la pêche dans notre Pays ?

MF : Les jeunes sont aujourd’hui un peu moins fonceurs et ont moins de volonté pour se mettre à la mouche et surtout au montage des artificielles ! Ils supportent mal les bredouilles répétitives qui les déçoivent rapidement, car ils sont pressés d’atteindre un niveau leur permettant de bien assimiler les gestes et la technique, ce qui demande bien 2 saisons …. et ils abandonnent … !
La Franche comté en matière de pêche a bien baissé depuis 20 ans, et n’est pas comparable à la Mongolie, aux USA, à la Pologne ou au Canada Une poignée parmi ceux qui habitent au bord ou pas loin de l’eau comprennent mieux ce qu’est la pêche à la mouche, et persistent, échangent, évoluent et progressent, mais c’est une petite minorité…….
10% représentant les plus jeunes de mon école mouche d’aujourd’hui sont super, malheureusement ils nous quittent tôt à cause de leurs études………….. mais il faut espérer que, comme moi, ils reviendront plus tard au bord de l’eau.

Le nombre de pêcheurs en France diminue nettement, alors qu’aux USA 6 millions de moucheurs fréquentent les rivières !!



NG : j’ai été très honoré de te recevoir sur ce Blog Michel, il y a des gens dans la vie qui sont à part, qui touchent plus que d’autres, tu en fais partie par ta sincérité, ton humour, ta gentillesse, ta sensibilité et l’amour que tu portes à la vie et ta passion : la pêche à la mouche.
Merci et ne change rien.

MF : j’espère ne rien changer car je suis toujours heureux de partager avec vous, que ce soit au bord de l’eau ou au cours de diverses manifestations…..alors à très bientôt

Ne change surtout pas Michel, on t'adore comme ça
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Vu la qualité de l’invité, j’ai eu le désir de recueillir sur lui l’avis d’ une personne également hors du commun .et mon choix s’est porté naturellement vers Jean Pierre Guillemaud ……plus connu sous le nom de Piam….
La suite est pour toi Michel…………….

NG :Piam, raconte nous ta première partie de pêche avec Michel.

Piam : La première fois que j’ai emmené Michel en Mongolie, j’ai un peu honte de dire que j’avais bêtement quelques soucis…
Michel est un peu différent et je me disais : comment ça va se passer ? Va-t-il bien s’intégrer au groupe ? Va-t-on pouvoir communiquer facilement ? Y a-t-il un danger ? etc…
J’étais fou ! Et à mille lieux de me rendre compte que Michel comprend tout plus vite que nous, qu’il a l’œil à tout et que son intelligence et sa gentillesse n’ont d’égales que ses talents de pêcheur à la mouche.
Maintenant lorsque je pêche en Mongolie sans lui, il me manque et je cherche quelque part son regard malin et complice qui semble jouir en permanence de tous les instants de pêche.

NG : Michel Flenet est connu dans le pays et même au-delà de nos frontières comme un monteur de mouches hors pair, mais je pense que c’est plus que ça non ?

Piam :Bien sûr, Michel n’a pas son pareil pour fabriquer une artificielle. C’est évident et là encore son sens de l’observation et son souci du détail sont inimitables. C’est son sixième sens à lui qui lui confère tellement de choses que nous ne pouvons pas comprendre. Bravo Michel pour tes souris et bravo doublement pour toutes ces mouches « gadget » qui nous amusent tant et qui prennent « en plus « des poissons.

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NG : Je sais que l’exercice est difficile, mais si tu devais résumer Michel en quelques mots?

Piam : Définir Michel, ?? Il faudrait écrire un livre !! .On peut dire que chacune de ses émotions est vécue au centuple et qu’il communique tous ses sentiments avec émotion, ce qui le rend tellement sympathique et touchant.
On le penserait vulnérable mais une force de caractère bien ancrée au plus profond de son œil malicieux le protège de toutes les mauvaises personnes qui pourraient imaginer que de ne pas entendre serait un handicap.
Non, Michel est bien là parmi nous les pêcheurs à la mouche. Il a son rôle et le tient avec brio. Tous, un jour ou l’autre, il nous émerveillera par un coup de ligne de génie tout comme cette nuit en Mongolie ou vers 3 heures du matin, iI hurlait comme lui seul peut le faire en tenant un taimen énorme qui dévalait le courant sans qu’il ne puisse rien faire par cette nuit noire. Michel était sorti pêcher, seul, sans rien dire. Comme il était heureux de nous voir sortir des yourtes en pyjama ,torche à la main à moitié endormis : .Il était fier de lui et plutôt satisfait d’avoir réveillé tout le monde. Il est vrai qu’à coté d’un taimen trophée pris à 3 heures du matin le sommeil des copains est bien peu de chose. !

Tu as raison Michel .Ta philosophie de la vie devrait être un exemple pour nous tous, tout comme le respect immense que tu voue à tes compagnons de jeu : les poissons.

Que la vie te conduise encore longtemps sur les rives des plus belles rivières du monde, tu le mérites bien. Et si tu penses que ton ami Piam n’est pas encore un mécréant, j’aurai plaisir à être le plus souvent possible avec toi.

J’ai pris énormément de plaisir a réaliser cette interview. J’ai reçu deux géants de la pêche à la mouche alors merci à vous deux Michel et Piam et à bientôt sur les berges d’une des belles Francomtoise………….

Un grand merci également à Misterhyde pour sa collaboration http://montotem.free.fr/