Les algues brunes et la mort sont de retour.
Par Nicolas39 le mardi 1 mai 2018, 20:30 - Gestion piscicole - Lien permanent
Triste réalité...
Les belles gravières blanches ont laissé place avec une vitesse foudroyante à un planché glissant composé d'algues brunes. Les fonds de la haute rivière d'Ain sont méconnaissables. Les premiers affluents que sont la Serpentine, la Saine et la Lemme sont également touchés. En particulier la Saine d'ailleurs dans un état lamentable. Tous les fonds sont brun foncé. Les galets ne respirent plus.
Tout cela est apparu vraiment très vite. Il y a encore 15 jours, lorsque j'ai participé au tournage TV pour Seasons, la rivière était magnifique. Les fonds superbes et je n'avais eu aucun signalement de poisson mort ou malade. Bref, le moral était au beau fixe. Et puis, il a fallut seulement quelques jours de soleil et de chaleur pour que les algues brunes envahissent d'heures en heures les fonds de la rivière d'Ain. C'est incroyable à la vitesse où cela évolue. On est passé d'une rivière splendide à un truc bien moche. Bien sûr, cela coïncide avec la fin des épandages. Oui, le comté est l’emblème de notre région mais à quel prix ? Combien de rivières vont subir l'envers du décor de la production laitière ? Toutes, certainement. La pêche et les pêcheurs ne font pas le poids contre cette économie et le monde agricole, c'est évident. Le seul espoir, et c'est certainement utopique de penser cela, c'est que les truites, au fil des générations, "s'habituent" à ce bouillon de substances et renforcent leurs défenses immunitaires naturelles. Bref, autant croire au père Noël...
La haute rivière d'Ain fin avril, y'a pas comme un soucis ? (merci Sébastien)
Comme les dernières années, c'est les gros poissons souvent au-delà des 45 centimètres qui trépassent en majorité. Rien que ce week-end, on m'a signalé de nombreux cas. Merci aux personnes qui m'ont fait passer les informations.
- 2 truites mycosées trouvées mortes sur Sirod (merci Andy).
- 3 poissons mycosés agonisants sur Crotenay amont (merci Guillaume).
- 1 truite morte (photo ci-dessous) de 54 cm trouvée sur l'aval de Crotenay (merci Bernard).
- 1 truite retirée de l'eau de 55 cm (photo ci-dessous) à Montigny (merci Gilles).
- 1 truite trouvée morte à Villard sur Ain (merci Gaël).
- J'ai moi-même vu une truite agonisante d'environ 50 cm mycosée sur Pont-du-Navoy.
C'est uniquement des signalements du WE. Je pense que c'est juste le début et que l'on va en voir pas mal dans les jours qui viennent malheureusement. J'ai plusieurs sentiments qui se mêlent au final entre dégout, désespoir, espoir, colère...
Oui, car j'ai malgré tout ça encore envie d'y croire. J'ai aussi vu des truites de l'année, de l'an passé et des poissons de 2 ans. Mais j'avoue que c'est bien triste de pêcher une rivière dans un tel état. On en vient à se poser des questions...Sans oublier que l'on est pêcheur.
Je sais très bien que par mes actions (Blog, Seasons, livre, etc...) je fais parti des acteurs pour la promotion du tourisme pêche sur la rivière d'Ain. J'ai toujours essayé d'être honnête vis à vis de mes lecteurs. Donner envie aux gens de venir dans notre région mais sans leur mentir. Oui, à ce jour, la population de truites sur la haute rivière d'Ain reste acceptable et d'un point de vue personnel, je pense que l'on peut continuer à pratiquer la pêche de loisir. Par contre, il devient inacceptable de continuer à prélever les truites adultes au vu des mortalités dans cette classe d'âge depuis 3 ans. J'évoquerai ce point au prochain C.A de fédération sans illusion malheureusement.
Dans le cas où vous pêchez pour remettre ensuite votre poisson à l'eau et au vu de la fragilité de certains individus, faites le de la meilleure des façons possibles. Décrochez votre poisson dans l'eau et relâchez-le vite sans le sortir de son élément tout en évitant des manipulations excessives. Si vous pêchez sans ardillon, on n'a pas besoin de toucher le poisson normalement. C'est le mieux pour lui.
A suivre...
Commentaires
Quoi dire de plus ? C'est tout simplement désolant, écoeurant. Plus aucun respect, ni pour les hommes, ni pour la nature. Plus les années passent et plus j'ai l'impression de résonner à l'inverse des gens. Je deviens vraiment pessimiste même si je garde au fond de moi un tout petit espoir, je ne peux que vous apporter ma compation.
Quelle tristesse...
Un grand merci pour tout ce que vous faites pour préserver nos rivières.L'eau est un bien commun qui devrait être inaliénable ...J'espère que BIENTÔT votre travail (et celui d'autres bénévoles qui se reconnaîtront ) portera ses fruits et qu'une prise de conscience collective , y compris du côté des agriculteurs , fera bouger les choses dans le bon sens . Pour la qualité de l'eau ;pour la vie qu'elle contient ;pour la santé humaine ;pour l'économie ;car nous avons forcément tout à y gagner ...Cordialement
Même constat dans les Vosges, elles sont déjà apparues il y a un peu moins d'un mois... on ajoute à ça les faibles débit et on a des rivières même en tête de bassins bien sales... Paradoxe incroyable suite au crue de l'hiver les jeunes alevins sont bien représentés encore cette année.
1° sortie de l'année sur la BRA vendredi dernier, et le constat est le même. Toutes les zones en dehors du courant principal sont marrons. Il n'aura fallu que 10 jours de soleil et de niveau relativement bas.
Bonjour,
Que dire... si ce n'est que je partage vos différents sentiments. Avec peut être la colère en moins car je suis usé.
Je suis originaire de la beauce. Quand j'avais 8 ans, un ami de mon père m'a pour la première fois emmené à la chasse. La biodiversité dont je n'avais pas conscience à l'époque était là. Aujourd'hui il n'y a plus rien... du tout...
Quand à 18 ans j'ai pris mon premier permis c'était la dégringolade. J'ai alors milité activement pour stopper les prélèvement sur les espèces en danger... avec succès. 3 ans d'arrêt sur la perdrix. 3 ans après il n'y avait plus rien.
Le vrai problème c'était le biotope.
J'ai racroché le fusil à la mort de cet ami. Tout cela n'avait plus de sens.
A l'age de 8 ans quand nous roulions de nuit en simca ou pour descendre en vacances. le pare-brise était recouvert d'insectes.
Aux labours, on ne voyait pas les tracteurs car les corbeaux volaient autour pour manger les vers.
Les champs de blés étaient rouge de coquelicots, les allouettes chantaient a tue-tête
Tout cela n'est plus.
Nous avons collectivement fait les mauvais choix.
La part du budget des ménages dans l'alimentaire a été divisée par 4 depuis l'après guerre.
Nous avons faite le choix de l'intensif, au prix le plus bas et la note est là. très salée.
Sur l'environnement mais aussi la santé: augmentation des cancers, baisse de la fécondité... et je ne vous parle pas des conditions d'élevage.
Nous sommes collectivement responsables, nous consommons trop de viande, de lait, de fromage nécessitant des cultures intensives de céréales (ici et ailleurs) avec les pesticides et dejections animales qui vont avec.
Espérons que la prise de conscience des jeunes générations amènera à plus de responsabilité et que nous aussi nous allons changer nos comportements. La nature est résiliante, il nous suffit juste de changer.
Ne nourissons pas des espoirs démesurés. Des tendances profondes et globales sont à l'oeuvre. Nos viandes et produits laitiers s'exportent dans le monde entier. Les émmergeants aspirent à consommer plus de proteines... et comment leur en vouloir.
Oeuvrons à notre mesure quotidiennement sur nous même et notre entourage pour infléchir cette tendance.
Enfin, et pour finir (désolé d'avoir été si long). Il faudrait que l'europe rende la collecte du lisié et sa méthanisation obligatoire.
Avec un recyclage des résidus (désication) et enrichissement des sols à l'aide de ces granulés (à libération progressive). Dès lors nous ne ferions plus face à des épandages massifs mais à un engrais dispensé en plusieurs fois ou pour partie exporté vers les plaines céréalières. En effet le lisié produit ne repose pas que sur l'agriculture locale il concentre des nitrates dont la source est très large (mais, colza, soja.. france, brézil, usa) qui se retrouvent aujourd'hui déversés sur les hectares environnants avec un effet concentrateur terrible.
Poussons peut etre pour cela. Ne nous opposons pas, proposons des solutions
merci d'avoir pris le temps de lire ce commentaire
cordialement
P2P
Merci à tous pour vos retours.
@P2P : Votre commentaire est rempli de bon sens, merci à vous d'avoir pris le temps de l'écrire.
y a encore malheureusement encore beaucoup de boulot pour arriver à rétablir cette situation avant de basculer dans l'irréparable quand on vois ces images heureusement que des personnes comme toi Nico et les "autres" aussi continuent à se battrent et dépenser leur énergie pour ne pas tomber dans le côté obscur.
encore bravo et courage! mais pour moi qui ai découvert ta rivière la saison dernière que c'est triste de la voir dans cet état..
Pensée...Quand tu nous tiens..
Oui...Quand je lis les gens qui s'offusquent de la situation de nos rivières Francs Comtoises..Je me pose une question, toute simple..Combien de personnes qui laissent des commentaires se sont impliquées directement dans la défense de nos rivières 10 % Et encore !!Allez..Il n'est jamais trop tard..Engageons nous ..Plus on sera, plus ça le f'ra..
Bonjour,
Merci pour ces commentaires.
Certes , la nature est résiliante ! Il existe bien une "auto épuration "des rivières (c'est ce que j'enseignais aux élèves) mais ELLE A SES LIMITES à partir de certains stades et en fonction des polluants ! c'est irréversible avec par exemple une eutrophisation . Je me souviens des articles de l'EST REPUBLICAIN sur la pollution du DESSOUBRE en ........ 1979 /1980 ...... au siècle dernier quoi !
Rien n'a vraiment changé que puis je faire ? dans la vie de tous les jours beaucoup de choses connues (on nous rebat sans cesse les oreilles et de façon légitime, la dessus). Il faut DIRE REPETER SOUVENT Manifester ? J'étais à ORNANS / GOUMOIS avec un certain Arthus lui même et le sénateur du coin / ST HYPPOLITE .... MORTEAU avec un barrage filtrant des choses sont faites (sos rivières comtoises ) .Mais c'est lent .
AU GPS LONS LE SAUNIER ANDRE TERRIER nous avait appris comment décrocher un ombre , une truite, après leur prise: suivre le fil avec ses doigts jusque dans l'eau , tourner un peu et les mouvements désespérés du poisson font qu'il se décroche très souvent tout seul. A cette période pas d'APN ni CAMERA ou autre face book .
Voila voila
Bien désolant mais espérons toujours !
Bravo pour l'article. Malheureusement ce sont toujours les mêmes qui sont responsables de cela : pesticides, algicide, fongicide, nitrate, glyphosate etc..... l'eau de nos rivières est un bien commun et à ce titre doit être considéré comme précieuse et non pas comme un déversoir à merde. Messieurs les agriculteurs tout cela ne dépend que de vous. Je sais que mes propos peuvent choquer néanmoins j'ai des amis agriculteurs qui prennent conscience de ces problèmes et qui essayent de trouver des solutions. Encourageons ces démarches. Simplement aujourd'hui trop de mal a été fait pour se satisfaire des rares exemples qui vont dans le bon sens. C'est une opération à très grande échelle qui doit être entrepris: fédérations, Aappma, gouvernement et surtout les bénévoles nombreux que nous sommes feront bouger les choses.
Il y a un truc que je pige pas
Quand on fais des recherches sur internet pour comprendre le phénomène on trouve rien? C'est moi qui utilise les mauvais mots clef ou quoi ?
Perso je suis en haute Savoie et on peut voir aussi la prolifération d'algues brunes et la mort de petits et gros spécimens en automne
Je regarderai au printemps
@Flavien : Chez nous c'est plus au printemps oui.