Passez votre chemin si vous pensez lire un texte de pêche. Aujourd'hui, je souhaitais écrire quelques mots sur ma grand-mère qui nous a quitté.

Il y a des femmes qui comptent plus que d’autres dans la vie d'un homme. Dans mon cas, ma chérie et mes deux filles sont loin devant, mais juste derrière, il y a ma grand-mère paternelle. Mamie Berthe nous a quitté le 18 mai dernier. Certainement un soulagement pour elle. Quoi que je n’en sais rien en fait. Elle s’accrochait tellement à la vie que plus j’y pense, plus j’en doute. Le covid ne l'aura pas tué, mais le confinement type "prison" qu'elle a subit à cause de ce virus aura eu le même effet.  

Ma mamie, s’était mon héroïne. Elle m’a sauvé la vie de bien des manières dans le passé. Je lui dois tellement. C’était une femme d’une immense générosité qui donnait tout son temps, toute son énergie, tout ce qu’elle avait pour sa famille et les gens qu’elle aimait. Sans elle et son extraordinaire dévouement, j’aurais certainement terminé enfant de la Ddass. Oui, mais voilà, elle a mis son grain de sel dans ma vie juste au moment où il le fallait. Elle avait une force de caractère incroyable quand il s’agissait de ses proches, de son sang. Avec des moyens dérisoires d’opératrice en lunetterie, elle est arrivée à déplacer des montagnes pour que je puisse conserver un cadre de vie avec les repères qui étaient les miens. Je lui en serais éternellement reconnaissant.

Ma mamie était ce genre de femme qui en toute discrétion guidait sa famille sur le bon chemin. Elle n'avait que ce but. À chaque fois qu'un de nous quittait la route, elle était là pour nous soutenir, nous aider. Mamie Berthe était aussi ce genre de femme qui nous attendait avec un grand sourire lorsque l’on rentrait du coup du soir à 22h45 un soir de juin avec mon oncle Nanou et mon Papy Raymond. Jamais elle ne se serait couchée avant notre arrivée. Le repas était prêt, la table mise. Nous n’avions plus qu’à nous régaler et lui raconter nos histoires de truites. Je pense sincèrement que le fond des histoires de l'intéressait pas, mais par contre, du moment qu'elle passait du temps avec nous, qu'elle nous voyait heureux, c'était forcément un bon moment pour elle. Et pas question de faire quoi que ce soit après, c’était son plaisir à elle, s’occuper de ses hommes. D'ailleurs, elle m'a toujours dit que son rêve aurait été d'avoir un modeste petit restaurant pour le plaisir de faire à manger aux gens. Moi, mon plaisir était de lui demander de me faire un plat de rognons. Jamais je n'ai retrouvé le goût de ceux de ma mamie.

Mamie a eu trois fils, elle a élevé un quatrième garçon qu’elle a considéré comme le sien. Elle les a perdu tous les 4 ainsi que son mari au fil des ans. Je ne sais pas comment elle a fait pour vivre avec ces cinq traumatismes par la suite. Qu’elle force ! C'était une femme extraordinaire.

Sans doute que ses petits enfants était sa nouvelle envie de vivre.

Qu’est-ce que je lui en ai ramené des truites à ma petite mamie, elle adorait les manger ! Croyez-moi si vous voulez, mais elle ne sait jamais trompé entre une truite prise à Sirod tout en haut de la rivière et une autre prise plus en aval. Au goût, elle devinait sans jamais faillir. J’étais à chaque fois sur le cul. Dire que souvent, je ne lui ramenais même pas vidé. Je déversais le contenu de mon panier en osier dans l'évier. Elle ne disait rien, quelque soit le moment, elle vidait les poissons pour moi. Du moment que cela me rendait heureux, rien n’avait plus d’importance. Mamie Berthe vivait avant tout pour le bonheur des autres. Car ce bonheur faisait le sien. 

Ma mamie, c’est toute mon enfance, toutes mes premières joies, toutes mes premières peines. Elle m’a tellement donné. Elle m’a transmis de nombreuses valeurs que j'essaie à mon tour de transmettre à mes enfants. Je suis très heureux qu’elle ait pu vivre assez longtemps pour me voir fonder ma propre famille et voir grandir mes enfants. Pour lui faire serrer dans ses bras trois nouveaux petits enfants. Après tout ce qu’elle avait fait pour moi, c’était une belle satisfaction mutuelle.

Mes toutes dernières truites sauvages que j’ai tué, c’était pour elle. Et si elle était encore capable d’en manger aujourd’hui, je ferais cette exception pour ma petite mamie. Rien que pour elle malgré tout ce que j'en pense. 

Si ses dernières années de vie n’ont pas été les plus joyeuses, je vais retenir cette longue période de bonheur que j’ai passé à ses côtés. Mamie sera toujours présente dans mon cœur et dans mon esprit. J’ai eu cet incroyable privilège d’avoir la plus merveilleuse et la plus courageuse des mamies.

Mon fils profitant des talents à la cuisine de sa grand-mère.